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| Bourguiba sur France 5 | |
| | Auteur | Message |
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sof Homulus Administratus
Nombre de messages : 2314 Age : 44 Date d'inscription : 02/07/2007
| Sujet: Bourguiba sur France 5 2/7/2007, 20:26 | |
| Ayya un petit sujet pour gagner des points Lundi 2 Juillet 20h40 sur France 5 http://www.france5.fr/programmes/index-fr.php?affnum=007637&prgnum=0&numcase=43&date=02-07-2007&plage=1900-2400 Je crois que c'est une ancienne émission : A voire ou à revoire.. | |
| | | Admin Homulus Supranus
Nombre de messages : 64 Date d'inscription : 30/06/2007
| Sujet: Re: Bourguiba sur France 5 2/7/2007, 20:29 | |
| - sof a écrit:
- Ayya un petit sujet pour gagner des points
Lundi 2 Juillet 20h40 sur France 5
http://www.france5.fr/programmes/index-fr.php?affnum=007637&prgnum=0&numcase=43&date=02-07-2007&plage=1900-2400
Je crois que c'est une ancienne émission : A voire ou à revoire.. Overdrive si tu passes par ici .... est ce que tu pourrait l'enregistrer et le mettre a partager STP ??? Merci | |
| | | Ghoul Homo Pacificus
Nombre de messages : 2552 Age : 50 Date d'inscription : 02/07/2007
| Sujet: Re: Bourguiba sur France 5 3/7/2007, 14:57 | |
| - sof a écrit:
Je crois que c'est une ancienne émission : A voire ou à revoire.. oui c'est une redif, mais c un bon doc! | |
| | | Admin Homulus Supranus
Nombre de messages : 64 Date d'inscription : 30/06/2007
| Sujet: Re: Bourguiba sur France 5 3/7/2007, 16:51 | |
| Est ce que qq'un l'a enregistre ? | |
| | | weld rbat Homulus Foetus
Nombre de messages : 27 Date d'inscription : 03/07/2007
| Sujet: Re: Bourguiba sur France 5 3/7/2007, 16:51 | |
| - sof a écrit:
- Ayya un petit sujet pour gagner des points
Lundi 2 Juillet 20h40 sur France 5
http://www.france5.fr/programmes/index-fr.php?affnum=007637&prgnum=0&numcase=43&date=02-07-2007&plage=1900-2400
Je crois que c'est une ancienne émission : A voire ou à revoire.. inti sraft sraft, femmechi zemen Bourguiba mta3 el3arabiya ? | |
| | | sof Homulus Administratus
Nombre de messages : 2314 Age : 44 Date d'inscription : 02/07/2007
| Sujet: Re: Bourguiba sur France 5 3/7/2007, 17:08 | |
| - weld rbat a écrit:
- sof a écrit:
- Ayya un petit sujet pour gagner des points
Lundi 2 Juillet 20h40 sur France 5
http://www.france5.fr/programmes/index-fr.php?affnum=007637&prgnum=0&numcase=43&date=02-07-2007&plage=1900-2400
Je crois que c'est une ancienne émission : A voire ou à revoire.. inti sraft sraft, femmechi zemen Bourguiba mta3 el3arabiya ? Le lien pointe vers l article de France 5 qui parle de la diffusion du doc. Je n'ai pas de lien de telechargement vers Zaman Bourguiba, je vais voir si j'ai gardé ça sur mon ordi perso après et je te dirai.. | |
| | | weld rbat Homulus Foetus
Nombre de messages : 27 Date d'inscription : 03/07/2007
| Sujet: Re: Bourguiba sur France 5 3/7/2007, 17:30 | |
| - sof a écrit:
- weld rbat a écrit:
- sof a écrit:
- Ayya un petit sujet pour gagner des points
Lundi 2 Juillet 20h40 sur France 5
http://www.france5.fr/programmes/index-fr.php?affnum=007637&prgnum=0&numcase=43&date=02-07-2007&plage=1900-2400
Je crois que c'est une ancienne émission : A voire ou à revoire.. inti sraft sraft, femmechi zemen Bourguiba mta3 el3arabiya ? Le lien pointe vers l article de France 5 qui parle de la diffusion du doc. Je n'ai pas de lien de telechargement vers Zaman Bourguiba, je vais voir si j'ai gardé ça sur mon ordi perso après et je te dirai.. ok Sof... | |
| | | Kahéna Homo Addictus
Nombre de messages : 1913 Age : 107 Localisation : Behind you Emploi : legal Date d'inscription : 22/02/2008
| Sujet: Re: Bourguiba sur France 5 15/4/2010, 17:25 | |
| Billet très intéressant de Ben Yahmed: - Spoiler:
Un général, des dizaines d’officiers et quelques milliers de soldats français furent faits prisonniers et conduits à pied en détention. L’onde de choc fut énorme, mondiale ; l’Histoire s’accéléra et l’empire français se mit à vaciller… À Paris, le gouvernement de Joseph Laniel tomba et, revirement inespéré, on fit appel pour diriger l’exécutif français à Pierre Mendès France, l’homme qui plaidait pour une nouvelle politique coloniale de la France. En un mois, PMF, comme on l’appelait, désengagea la France de la guerre d’Indochine et, sans perdre un jour, s’attaqua au « problème tunisien ». Le chef incontesté du nationalisme tunisien était alors Habib Bourguiba ; le régime colonial l’avait arrêté en janvier 1952 et déporté dans l’île inhabitée de La Galite, où il languissait depuis trente mois, seul, gardé par des gendarmes. PMF le fit transférer en France, et, du jour au lendemain, d’infréquentables, lui et son parti, le Néo-Destour, furent érigés, discrètement, en interlocuteurs valables de la République française. Celle-ci consentit à l’autonomie interne de la Tunisie, puis, en 1955, se résigna, dans la foulée, à l’indépendance quasi simultanée du Maroc (le 3 mars 1956) et de la Tunisie (le 20 du même mois). Pour tenter, vainement d’ailleurs, de sauver sa mainmise sur l’Algérie… Le 6 avril 1956, Habib Bourguiba devint le premier président du Conseil de la Tunisie indépendante. Seize mois plus tard, le 25 juillet 1957, il écartait le Bey, monarque nominal, et proclamait la République. Tout naturellement, il en fut le premier président et le demeura… jusqu’en novembre 1987. Lorsqu’il accéda au pouvoir, Habib Bourguiba avait 55 ans. Ses longues années de prison ou d’exil lui avaient permis de lire et de réfléchir. C’était en tout cas, j’en témoigne, un homme reposé et qui s’était méticuleusement préparé, physiquement et intellectuellement, à l’exercice du pouvoir. J’ai eu le privilège de le connaître et de le pratiquer dès 1954, avant qu’il ne parvienne au pouvoir, puis dans les premières années de sa présidence, alors qu’il était au summum de ses moyens. À 26 ans, je suis devenu l’un de ses très proches collaborateurs et le suis demeuré près de quatre ans pendant lesquels il me manifesta beaucoup d’affection. Je l’ai quitté à la fin de 1957. Par la suite, et jusqu’au début des années 1970, j’ai fait partie du cercle de ceux qu’il recevait à sa table et traitait en amis, dont il sollicitait les avis. Je pense donc être l’un de ceux qui le connaissent le mieux. Je lui voue, en tout cas, et à ce jour, comme tous ceux qui l’ont bien connu, la plus grande admiration. L’état civil le déclarait né le 3 août 1903. Mais on savait, et lui-même admettait, qu’il avait vu le jour en 1901. Il a quitté ce monde il y a tout juste dix ans, dans la dernière année du XXe siècle. Mais, en vérité, il s’était retiré de la vie active bien plus tôt. Et en deux temps. La première fois, dès 1969, lorsque s’est déclarée une maladie neuropsychologique qui en a fait un être très diminué pour le reste de sa vie, ce qui aurait dû l’inciter – ainsi que son parti – à préparer sa succession. Au lieu de quoi ses proches collaborateurs le déclarèrent (et il se laissa déclarer par eux), en mars 1975… président à vie. Âgé et malade, devenu l’ombre de lui-même, il sera, douze années durant, un président fantôme manipulé par sa famille et par son entourage. Jusqu’à ce 7 novembre 1987 où le Premier ministre qu’il venait de désigner se décida, courageusement, à mettre un terme à cette mauvaise comédie : trente et un ans après avoir accédé au pouvoir, en couronnement d’un combat intelligemment mené et qui avait lui-même duré un quart de siècle, Habib Bourguiba perdait ce pouvoir et le quittait sans gloire, définitivement. C’est son second retrait de la vie active, à 86 ans. Il est mort (presque) centenaire après avoir été chef de l’exécutif pendant plus de trente et un ans. Et pourtant, il n’aura réellement exercé le pouvoir – et très bien – que pendant treize ans, de 1956 à 1969. C’est vers le milieu de cette année-là, en effet, qu’il perdit l’esprit. Sa belle intelligence sombra, victime d’une dépression tenace dont on savait, dès 1970, qu’il ne se relèverait pas. Les neurologues qui le traitaient en informèrent alors sans ambages son entourage et son gouvernement… lesquels, parce que cela les arrangeait, ne tinrent aucun compte de l’avis médical… De là où il est, s’il voyait son pays, gouverné depuis près d’un quart de siècle par d’autres que lui-même et ceux dont il s’était entouré, qu’en penserait-il ? L’esprit éminemment synthétique que j’ai connu dirait, je pense, que l’essentiel de ce qu’il a semé a été préservé et continue de pousser : • Le pays dont il a voulu la modernisation poursuit dans la même voie et tire le meilleur parti des bases qu’il a laissées. • La libération de la femme tunisienne, qui lui tenait à cœur au point qu’il l’a édictée et mise sur les rails dans les cent premiers jours de son accession au pouvoir, s’enracine. En 2010, une troisième génération en bénéficie. • Quant à la scolarité obligatoire des garçons et des filles, qu’il a commencé à généraliser dès son premier gouvernement, elle a atteint le stade dont rêvait le père de l’indépendance tunisienne : un quasi-100 %. La démocratisation n’a pas progressé au même rythme que l’éducation et l’économie ? Et alors, où est le problème ? répondrait Bourguiba, qui, lorsqu’il était encore lucide, pensait, à l’instar d’un Deng Xiaoping en Chine, que son peuple n’y était pas préparé et qu’il n’était pas encore temps d’y songer… Habib Bourguiba a donc perdu jusqu’aux apparences du pouvoir il y a vingt-trois ans et n’est plus de notre monde depuis dix ans. Le temps est venu de commencer à évaluer la trace historique qu’il a laissée. C’est aux historiens de le faire. Mais le témoin que j’ai été et le journaliste que je suis peut, à leur intention et à celle du lecteur, ajouter quelques touches à ce qui a été dit. 1 ) Même sur le plan physique, Habib Bourguiba ne ressemblait pas au Tunisien moyen. Mais, plus étonnant, s’il avait avec certains chefs d’État et autres fauves de la politique quelques traits communs, il ne ressemblait en vérité à aucun autre, en tout cas à aucun de ceux que j’ai pu connaître. Il n’a d’ailleurs compté aucun ami parmi eux et ne se plaisait pas en leur compagnie. 2) Les chefs d’État arabo-musulmans ne le considéraient pas comme l’un des leurs ; lui moquait leur inculture et l’absence, chez eux, du sens de l’État. Contrairement à la plupart d’entre eux, il ne s’intéressait pas à l’argent, dont il se tenait à bonne distance. Là où il suscitait inébranlables fidélités et admiration, eux faisaient éclore complots et trahisons. Si, au Maghreb, un Hassan II rivalisait de culture avec lui, il l’exécutait d’une phrase. À ma question : « Quel est votre jugement sur lui ? », il répondit sans hésiter : « C’est un tueur, et qui parvient à ne laisser aucune trace. »
Bourguiba ne parlait, ne lisait que l’arabe et le français, mais il a lu le plus intéressant de ce qui est paru dans ces deux langues et a beaucoup retenu. Président, il ne ratait aucun livre important, consacrant une partie de ses après-midi à la lecture. 3) S’il n’avait pas d’atomes crochus avec les chefs d’État du Maghreb, il était en revanche apprécié de leurs peuples et de leurs cadres, qui, dans leur majorité, admiraient ses positions courageuses et iconoclastes, enviaient les Tunisiens de l’avoir comme président.
4) L’Afrique noire, comme on l’appelait à son époque, Bourguiba la regardait d’assez loin, sans montrer un réel désir d’approfondir sa connaissance de ses hommes et de ses problèmes. Il a participé à la création de l’OUA en mai 1963, voyagé au sud du Sahara, reçu les hommes politiques de la région, qu’ils fussent au pouvoir ou dans l’opposition, aidé financièrement l’ANC de Mandela et d’autres combattants de la liberté. Mais il donnait l’impression que c’était seulement par devoir. 5) Il connaissait bien l’histoire de France et savait pertinemment qu’il avait été façonné par la culture de ce pays, qui était, à son époque, très marqué par l’esprit colonial. Malgré son long combat contre le colonialisme et sa dizaine d’années de prison, il ne nourrissait à l’égard de la France et des Français aucun grief. Mais il n’avait pas d’amis français, ne s’est senti en connivence avec aucun dirigeant, ni de la IVe ni de la Ve République. Il ne passait pas ses vacances en France, n’y possédait aucun compte en banque, aucun bien.
6) Restent les États-Unis : je pense qu’il n’a jamais oublié qu’un certain général Juin avait eu le pouvoir de le tuer et avait voulu passer à l’acte en 1944. Pour supprimer ce levain de nationalisme qu’il jugeait, à juste titre, éminemment dangereux pour la présence coloniale française. Et qu’il revint alors au consul général des États-Unis en Tunisie de lui sauver la vie. Lorsque Bourguiba accéda au pouvoir, en 1956, la guerre froide battait son plein et l’anticommuniste viscéral qu’il était trouva dans cet affrontement une raison supplémentaire de déclarer son indéfectible amitié au chef de file de l’anticommunisme qu’étaient les États-Unis. Il attendait en outre de ce pays qu’il fasse contrepoids à la France et protégeât la jeune République tunisienne de tout empiétement post-colonial de l’ancienne métropole, embourbée alors dans la guerre d’Algérie.
7) C’était connu et cela faisait même sourire : Habib Bourguiba avait une très haute conscience de sa valeur. Mais, lui, contrairement à d’autres, ne se gênait nullement pour proclamer qu’il était… exceptionnel ! – Des hommes de ma stature, la nature n’en produit, dans le monde, que quelques-uns par siècle, disait-il volontiers. Et à cette question que lui posa un journaliste vers la fin de la guerre d’Algérie : Y a-t-il, à votre avis, un Bourguiba algérien ? Il n’hésita pas une seconde à répondre : S’il existait, cela se saurait. Je précise cependant, pour être juste, que cette haute idée qu’il avait à juste titre de lui-même et qu’il exprimait sans fausse modestie n’a aucunement tué en lui le sens de l’humour. Et j’ajoute que je n’ai jamais vu personne appréhender aussi vite et aussi bien que lui, en un éclair, la vérité d’un homme, d’une femme ou d’une situation.
Il ne cédait pas pour autant à n’importe quel compliment. Un jour, l’un de ses collaborateurs, voulant dire à Bourguiba qu’il était un grand réformateur et pensant le flatter, le compara à Mustapha Kemal, le célèbre Atatürk, fondateur, en 1923, de la République turque. – Non, répondit-il, Atatürk a été trop brutal, il a fait trop et trop vite, il est allé trop loin… Ce n’est pas moi. À la réflexion, et pour conclure, je connais trois autres chefs d’État contemporains très différents les uns des autres, mais qui ont de nombreux points communs. Tous les quatre ont exercé la fonction de chef d’État avec la même dignité et l’ont quittée en laissant une trace à ce jour perceptible. Pour moi, de Gaulle, Mitterrand, Senghor et Bourguiba sont, si j’ose dire, de la même race. Tous les quatre avaient une vaste culture historique et générale – mais universelle – et étaient à la fois des intellectuels et des hommes d’action ! Comme, de nos jours, un certain Barack Obama ! Ils ont, chacun à sa manière, mis une distance certaine entre eux et l’argent. Ils ont été des centralisateurs de pouvoir, voire des autocrates. Et, en même temps, ils ont su beaucoup déléguer, faire confiance à leurs collaborateurs et leur laisser une très grande latitude. Mais ce qui les a véritablement distingués, et qui est le signe de leur grandeur, c’est qu’ils n’ont pas été trahis par leurs proches. Ils ont, tout au contraire, fait naître d’inébranlables dévouements, des fidélités à toute épreuve. Tous les quatre ont suscité, de leur vivant, l’admiration de leurs compatriotes et de leurs contemporains. Et la suscitent encore aujourd’hui, bien après leur mort
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| | | Mr Magoo Homo Habilis
Nombre de messages : 302 Date d'inscription : 17/01/2010
| Sujet: Re: Bourguiba sur France 5 15/4/2010, 21:50 | |
| - Kahéna a écrit:
- Billet très intéressant de Ben Yahmed:
- Spoiler:
Un général, des dizaines d’officiers et quelques milliers de soldats français furent faits prisonniers et conduits à pied en détention. L’onde de choc fut énorme, mondiale ; l’Histoire s’accéléra et l’empire français se mit à vaciller… À Paris, le gouvernement de Joseph Laniel tomba et, revirement inespéré, on fit appel pour diriger l’exécutif français à Pierre Mendès France, l’homme qui plaidait pour une nouvelle politique coloniale de la France. En un mois, PMF, comme on l’appelait, désengagea la France de la guerre d’Indochine et, sans perdre un jour, s’attaqua au « problème tunisien ». Le chef incontesté du nationalisme tunisien était alors Habib Bourguiba ; le régime colonial l’avait arrêté en janvier 1952 et déporté dans l’île inhabitée de La Galite, où il languissait depuis trente mois, seul, gardé par des gendarmes. PMF le fit transférer en France, et, du jour au lendemain, d’infréquentables, lui et son parti, le Néo-Destour, furent érigés, discrètement, en interlocuteurs valables de la République française. Celle-ci consentit à l’autonomie interne de la Tunisie, puis, en 1955, se résigna, dans la foulée, à l’indépendance quasi simultanée du Maroc (le 3 mars 1956) et de la Tunisie (le 20 du même mois). Pour tenter, vainement d’ailleurs, de sauver sa mainmise sur l’Algérie… Le 6 avril 1956, Habib Bourguiba devint le premier président du Conseil de la Tunisie indépendante. Seize mois plus tard, le 25 juillet 1957, il écartait le Bey, monarque nominal, et proclamait la République. Tout naturellement, il en fut le premier président et le demeura… jusqu’en novembre 1987. Lorsqu’il accéda au pouvoir, Habib Bourguiba avait 55 ans. Ses longues années de prison ou d’exil lui avaient permis de lire et de réfléchir. C’était en tout cas, j’en témoigne, un homme reposé et qui s’était méticuleusement préparé, physiquement et intellectuellement, à l’exercice du pouvoir. J’ai eu le privilège de le connaître et de le pratiquer dès 1954, avant qu’il ne parvienne au pouvoir, puis dans les premières années de sa présidence, alors qu’il était au summum de ses moyens. À 26 ans, je suis devenu l’un de ses très proches collaborateurs et le suis demeuré près de quatre ans pendant lesquels il me manifesta beaucoup d’affection. Je l’ai quitté à la fin de 1957. Par la suite, et jusqu’au début des années 1970, j’ai fait partie du cercle de ceux qu’il recevait à sa table et traitait en amis, dont il sollicitait les avis. Je pense donc être l’un de ceux qui le connaissent le mieux. Je lui voue, en tout cas, et à ce jour, comme tous ceux qui l’ont bien connu, la plus grande admiration. L’état civil le déclarait né le 3 août 1903. Mais on savait, et lui-même admettait, qu’il avait vu le jour en 1901. Il a quitté ce monde il y a tout juste dix ans, dans la dernière année du XXe siècle. Mais, en vérité, il s’était retiré de la vie active bien plus tôt. Et en deux temps. La première fois, dès 1969, lorsque s’est déclarée une maladie neuropsychologique qui en a fait un être très diminué pour le reste de sa vie, ce qui aurait dû l’inciter – ainsi que son parti – à préparer sa succession. Au lieu de quoi ses proches collaborateurs le déclarèrent (et il se laissa déclarer par eux), en mars 1975… président à vie. Âgé et malade, devenu l’ombre de lui-même, il sera, douze années durant, un président fantôme manipulé par sa famille et par son entourage. Jusqu’à ce 7 novembre 1987 où le Premier ministre qu’il venait de désigner se décida, courageusement, à mettre un terme à cette mauvaise comédie : trente et un ans après avoir accédé au pouvoir, en couronnement d’un combat intelligemment mené et qui avait lui-même duré un quart de siècle, Habib Bourguiba perdait ce pouvoir et le quittait sans gloire, définitivement. C’est son second retrait de la vie active, à 86 ans. Il est mort (presque) centenaire après avoir été chef de l’exécutif pendant plus de trente et un ans. Et pourtant, il n’aura réellement exercé le pouvoir – et très bien – que pendant treize ans, de 1956 à 1969. C’est vers le milieu de cette année-là, en effet, qu’il perdit l’esprit. Sa belle intelligence sombra, victime d’une dépression tenace dont on savait, dès 1970, qu’il ne se relèverait pas. Les neurologues qui le traitaient en informèrent alors sans ambages son entourage et son gouvernement… lesquels, parce que cela les arrangeait, ne tinrent aucun compte de l’avis médical… De là où il est, s’il voyait son pays, gouverné depuis près d’un quart de siècle par d’autres que lui-même et ceux dont il s’était entouré, qu’en penserait-il ? L’esprit éminemment synthétique que j’ai connu dirait, je pense, que l’essentiel de ce qu’il a semé a été préservé et continue de pousser : • Le pays dont il a voulu la modernisation poursuit dans la même voie et tire le meilleur parti des bases qu’il a laissées. • La libération de la femme tunisienne, qui lui tenait à cœur au point qu’il l’a édictée et mise sur les rails dans les cent premiers jours de son accession au pouvoir, s’enracine. En 2010, une troisième génération en bénéficie. • Quant à la scolarité obligatoire des garçons et des filles, qu’il a commencé à généraliser dès son premier gouvernement, elle a atteint le stade dont rêvait le père de l’indépendance tunisienne : un quasi-100 %. La démocratisation n’a pas progressé au même rythme que l’éducation et l’économie ? Et alors, où est le problème ? répondrait Bourguiba, qui, lorsqu’il était encore lucide, pensait, à l’instar d’un Deng Xiaoping en Chine, que son peuple n’y était pas préparé et qu’il n’était pas encore temps d’y songer… Habib Bourguiba a donc perdu jusqu’aux apparences du pouvoir il y a vingt-trois ans et n’est plus de notre monde depuis dix ans. Le temps est venu de commencer à évaluer la trace historique qu’il a laissée. C’est aux historiens de le faire. Mais le témoin que j’ai été et le journaliste que je suis peut, à leur intention et à celle du lecteur, ajouter quelques touches à ce qui a été dit. 1 ) Même sur le plan physique, Habib Bourguiba ne ressemblait pas au Tunisien moyen. Mais, plus étonnant, s’il avait avec certains chefs d’État et autres fauves de la politique quelques traits communs, il ne ressemblait en vérité à aucun autre, en tout cas à aucun de ceux que j’ai pu connaître. Il n’a d’ailleurs compté aucun ami parmi eux et ne se plaisait pas en leur compagnie. 2) Les chefs d’État arabo-musulmans ne le considéraient pas comme l’un des leurs ; lui moquait leur inculture et l’absence, chez eux, du sens de l’État. Contrairement à la plupart d’entre eux, il ne s’intéressait pas à l’argent, dont il se tenait à bonne distance. Là où il suscitait inébranlables fidélités et admiration, eux faisaient éclore complots et trahisons. Si, au Maghreb, un Hassan II rivalisait de culture avec lui, il l’exécutait d’une phrase. À ma question : « Quel est votre jugement sur lui ? », il répondit sans hésiter : « C’est un tueur, et qui parvient à ne laisser aucune trace. »
Bourguiba ne parlait, ne lisait que l’arabe et le français, mais il a lu le plus intéressant de ce qui est paru dans ces deux langues et a beaucoup retenu. Président, il ne ratait aucun livre important, consacrant une partie de ses après-midi à la lecture. 3) S’il n’avait pas d’atomes crochus avec les chefs d’État du Maghreb, il était en revanche apprécié de leurs peuples et de leurs cadres, qui, dans leur majorité, admiraient ses positions courageuses et iconoclastes, enviaient les Tunisiens de l’avoir comme président.
4) L’Afrique noire, comme on l’appelait à son époque, Bourguiba la regardait d’assez loin, sans montrer un réel désir d’approfondir sa connaissance de ses hommes et de ses problèmes. Il a participé à la création de l’OUA en mai 1963, voyagé au sud du Sahara, reçu les hommes politiques de la région, qu’ils fussent au pouvoir ou dans l’opposition, aidé financièrement l’ANC de Mandela et d’autres combattants de la liberté. Mais il donnait l’impression que c’était seulement par devoir. 5) Il connaissait bien l’histoire de France et savait pertinemment qu’il avait été façonné par la culture de ce pays, qui était, à son époque, très marqué par l’esprit colonial. Malgré son long combat contre le colonialisme et sa dizaine d’années de prison, il ne nourrissait à l’égard de la France et des Français aucun grief. Mais il n’avait pas d’amis français, ne s’est senti en connivence avec aucun dirigeant, ni de la IVe ni de la Ve République. Il ne passait pas ses vacances en France, n’y possédait aucun compte en banque, aucun bien.
6) Restent les États-Unis : je pense qu’il n’a jamais oublié qu’un certain général Juin avait eu le pouvoir de le tuer et avait voulu passer à l’acte en 1944. Pour supprimer ce levain de nationalisme qu’il jugeait, à juste titre, éminemment dangereux pour la présence coloniale française. Et qu’il revint alors au consul général des États-Unis en Tunisie de lui sauver la vie. Lorsque Bourguiba accéda au pouvoir, en 1956, la guerre froide battait son plein et l’anticommuniste viscéral qu’il était trouva dans cet affrontement une raison supplémentaire de déclarer son indéfectible amitié au chef de file de l’anticommunisme qu’étaient les États-Unis. Il attendait en outre de ce pays qu’il fasse contrepoids à la France et protégeât la jeune République tunisienne de tout empiétement post-colonial de l’ancienne métropole, embourbée alors dans la guerre d’Algérie.
7) C’était connu et cela faisait même sourire : Habib Bourguiba avait une très haute conscience de sa valeur. Mais, lui, contrairement à d’autres, ne se gênait nullement pour proclamer qu’il était… exceptionnel ! – Des hommes de ma stature, la nature n’en produit, dans le monde, que quelques-uns par siècle, disait-il volontiers. Et à cette question que lui posa un journaliste vers la fin de la guerre d’Algérie : Y a-t-il, à votre avis, un Bourguiba algérien ? Il n’hésita pas une seconde à répondre : S’il existait, cela se saurait. Je précise cependant, pour être juste, que cette haute idée qu’il avait à juste titre de lui-même et qu’il exprimait sans fausse modestie n’a aucunement tué en lui le sens de l’humour. Et j’ajoute que je n’ai jamais vu personne appréhender aussi vite et aussi bien que lui, en un éclair, la vérité d’un homme, d’une femme ou d’une situation.
Il ne cédait pas pour autant à n’importe quel compliment. Un jour, l’un de ses collaborateurs, voulant dire à Bourguiba qu’il était un grand réformateur et pensant le flatter, le compara à Mustapha Kemal, le célèbre Atatürk, fondateur, en 1923, de la République turque. – Non, répondit-il, Atatürk a été trop brutal, il a fait trop et trop vite, il est allé trop loin… Ce n’est pas moi. À la réflexion, et pour conclure, je connais trois autres chefs d’État contemporains très différents les uns des autres, mais qui ont de nombreux points communs. Tous les quatre ont exercé la fonction de chef d’État avec la même dignité et l’ont quittée en laissant une trace à ce jour perceptible. Pour moi, de Gaulle, Mitterrand, Senghor et Bourguiba sont, si j’ose dire, de la même race. Tous les quatre avaient une vaste culture historique et générale – mais universelle – et étaient à la fois des intellectuels et des hommes d’action ! Comme, de nos jours, un certain Barack Obama ! Ils ont, chacun à sa manière, mis une distance certaine entre eux et l’argent. Ils ont été des centralisateurs de pouvoir, voire des autocrates. Et, en même temps, ils ont su beaucoup déléguer, faire confiance à leurs collaborateurs et leur laisser une très grande latitude. Mais ce qui les a véritablement distingués, et qui est le signe de leur grandeur, c’est qu’ils n’ont pas été trahis par leurs proches. Ils ont, tout au contraire, fait naître d’inébranlables dévouements, des fidélités à toute épreuve. Tous les quatre ont suscité, de leur vivant, l’admiration de leurs compatriotes et de leurs contemporains. Et la suscitent encore aujourd’hui, bien après leur mort
Cet article pue la langue de bois. Constat somme toute normal pour quelqu'un qui veut continuer à vendre JA l'Idiot chez les pygmées. | |
| | | Donnie Homo Habilis
Nombre de messages : 528 Date d'inscription : 08/07/2009
| Sujet: Re: Bourguiba sur France 5 15/4/2010, 22:05 | |
| - Kahéna a écrit:
- Citation :
- La première fois, dès 1969, lorsque s’est déclarée une maladie neuropsychologique qui en a fait un être très diminué pour le reste de sa vie, ce qui aurait dû l’inciter – ainsi que son parti – à préparer sa succession.
Au lieu de quoi ses proches collaborateurs le déclarèrent (et il se laissa déclarer par eux), en mars 1975… président à vie. Âgé et malade, devenu l’ombre de lui-même, il sera, douze années durant, un président fantôme manipulé par sa famille et par son entourage. Jusqu’à ce 7 novembre 1987 où le Premier ministre qu’il venait de désigner se décida, courageusement, à mettre un terme à cette mauvaise comédie : trente et un ans après avoir accédé au pouvoir, en couronnement d’un combat intelligemment mené et qui avait lui-même duré un quart de siècle, Habib Bourguiba perdait ce pouvoir et le quittait sans gloire, définitivement. C’est son second retrait de la vie active, à 86 ans.
Il est mort (presque) centenaire après avoir été chef de l’exécutif pendant plus de trente et un ans. Et pourtant, il n’aura réellement exercé le pouvoir – et très bien – que pendant treize ans, de 1956 à 1969. Et après on se demande pourquoi la Tunisie fait encore partie du tier monde. | |
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