Pratiquée dans 28 pays africains, mais aussi dans les communautés immigrées de France, d’Europe et des Etats-Unis, l’excision toucherait plus de 150 millions de femmes et fillettes dans le monde chaque année, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Interdite par la loi française et la Charte internationale des droits de l’Homme, l'excision reste légale dans de nombreux pays d'Afrique : au Mali, au Niger, au Tchad ou en Somalie, par exemple. Dans d'autres, la pratique est interdite par la loi mais reste très répandue : c'est le cas à Djibouti ou au Burkina Faso. La législation en vigueur n'est pas toujours très claire : en Egypte, ou près de 85% des femmes sont excisées, une loi de 1996 interdit la pratique "sauf cas d'urgence". Et l'exception est devenue la règle. En France, l’excision continue à être exercée clandestinement : on estime que près de 60 000 femmes sont excisées ou menacées d’excision chaque année.
Souvent effectuée sur des mineurs, voir des nourrissons, dans des conditions d’hygiène déplorables (sans anesthésie, à l’aide d’un couteau ou d’une lame de rasoir non désinfectée), l’excision est à première vue une "affaire de femmes" : elle est perpértuée par des "exciseuses" qui se transmettent le métier de mère en fille, et qui font partie de la caste des forgeronnes, très respectée dans les structures sociales traditionnelles africaines.
Domination de la femmePourtant, comme le souligne Oumou Diallo, membre fondatrice du Groupe de femmes pour l'abolition des mutilations sexuelles (GAMS), elle-même excisée à l’âge de 12 ans : "Si l’excision s’accroche, c’est que les hommes sont derrière." Autrement dit : les rites sociaux qui
entouraient la pratique ont disparu. Seule reste la volonté d’un grand
nombre d’Africains de contrôler, voir empêcher, le plaisir sexuel de la
femme.
Même son de cloche du côté de Bafing Kul, chanteur malien engagé contre l’excision qui a dû s’exiler en France suite aux menaces de mort que son combat lui a valu dans son pays : "L’excision est un instrument de domination de l’homme sur la femme." En écoutant les témoignages du mini-documentaire que le chanteur a tourné lors de son dernier séjour au Mali, on le comprend lorsqu’il affirme que "le sexisme est trop ancré dans les esprits, y compris ceux des femmes qui sont enfermées dans ces schémas de domination, pour que les choses changent du jour au lendemain".
Pourtant, un nombre toujours plus important de voix s’élève contre
cette pratique, et les campagnes de sensibilisation font doucement leur effet dans les campagnes africaines. "Mais rien se fera sans volonté politique", estime Bafing Kul. Volonté qui se fait timide lorsque la majorité de l’électorat des pays concernés reste largement favorable à l’excsion.