Forum Tunisien de Discussions Libres et Constructives |
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| Nizar QABBANI | |
| | Auteur | Message |
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Phidias Homo Pacificus
Nombre de messages : 5257 Localisation : ... dans le désert Date d'inscription : 04/07/2007
| Sujet: Re: Nizar QABBANI 27/1/2008, 02:37 | |
| Leçon d’art plastique
Mon fils pose devant moi sa palette de couleurs Et me demande de lui dessiner un oiseau. Je plonge le pinceau dans la couleur grise Et lui dessine un carré Avec des barreaux et un cadenas. Mon fils me dit, tout surpris : Mais c’est une prison, père, Ne sais-tu donc pas dessiner un oiseau ? Je lui dis : Mon fils, excuse-moi, Je ne sais plus comment sont faits les oiseaux.
Mon fils pose devant moi ses crayons de couleurs Et me demande de lui dessiner la mer. Je prends un crayon mine Et lui dessine un cercle noir. Mon fils me dit : Mais c’est un cercle noir, père, Ne sais-tu donc pas que la mer est bleue ? Je lui dis : Ecoute, mon fils, Jadis, je savais très bien dessiner les mers, Mais on m’a confisqué ma canne à pêche, On m’a pris mon bateau, On m’a interdit toute relation avec la couleur bleue, Et avec le poisson de la liberté.
Mon fils pose devant moi son cahier de dessin Et me demande de lui dessiner un épi de blé. Je prends un crayon Et lui dessine un revolver. Mon fils se moque de mon ignorance Et me dit, tout étonné : Ne fais-tu donc pas la différence Entre un épi de blé et un revolver ? Je lui réponds : Ecoute, mon fils, Je savais jadis comment était fait l’épi de blé, Comment était la galette de pain, Comment était la rose, Mais en ce temps métallique, Où les arbres de la forêt Se sont enrôlés dans la milice Où la rose est en tenue léopard, En ce temps d’épis armés, D’oiseaux armés, De culture armée, Je n’achète pas une galette de pain Sans y trouver un revolver, Je ne cueille pas une rose dans un bosquet Sans qu’elle me menace de son arme, Je ne feuillette pas un livre dans une librairie Sans qu’il explose entre mes mains.
Mon fils s’assoit sur le bord de mon lit Et me demande de lui réciter un poème. Je verse une larme sur l’oreiller. Il la ramasse et me dit : Mais c’est une larme, père, et non un poème, Je lui dis : Quand tu seras grand Et que tu liras la somme de la poésie arabe, Tu sauras que le mot et la larme sont frère et sœur Et que le poème arabe N’est qu’une larme qui coule entre les doigts. Mon fils pose devant moi sa boîte de couleurs Et me demande de lui dessiner une patrie. Le pinceau tremble dans ma main Et je fonds en larmes …
Nizar QABBANI (1923, Damas – 1998, Londres) Femmes (1988), Syrie
Sa poésie amoureuse, parfois libertine, lui valu une immense popularité dés ses débuts dans les années 1940. Après 1967, il est devenu un véritable phénomène de l’édition arabe grâce à ses poèmes engagés dans lesquels il dénonçait l’occupation israélienne, les pouvoirs en place, l’obscurantisme religieux et la violation des droits de l’homme. Usant sans complexe des mots de tous les jours, soucieux aussi de la musicalité immédiate de ses vers, il est l’un des rares à avoir simultanément pratiqué les mètres classiques, le vers libre et le poème prosé.
Merci à une amie tunisienne (N.) pour m’avoir fait découvrir cet auteur. | |
| | | Ghoul Homo Pacificus
Nombre de messages : 2552 Age : 50 Date d'inscription : 02/07/2007
| Sujet: Re: Nizar QABBANI 2/4/2008, 17:02 | |
| en arabe, nizar 9abbani (désolé Phidias) - Citation :
لقد مر عشرون عاما علينا لقد مر عشرون عام و لا نجم يسطع لا ارض تحبل لا قمح يطلع من تحت هذا الركام و لا غيمة ماطرة فهل نسي الشارع العربي الكلام و صرنا شعوبا بلا ذاكره؟؟؟ ***** لقد مر عشرون عاما علينا لقد مر عشرون عام و نحن وقوف كأعمدة الكهرباء نحدق مثل البهاليل صوب السماء تمر القطارات من قربنا تمر الحضارات من فوقنا تمر الزلازل من تحتنا فلا نتأمّل شيئا و لا نتعلم شيئا و لا نتذكر شيئا و لا نتحمس حين مجيئ الربيع و لا نتأثر حين الشتاء فلا الله يرضى المكوث لدينا ولا الانبياء ***** لقد مر عشرون عاما علينا لقد مر عشرون عام و ليس هنالك من يطرح الاسئلة و ليس هناك مسيح و لا جلجله و نحن هنا نتناسل مثل الزواحف في الغرف المقفله فاين هو الشاعر العربي الذي كان يبصق نارا و لا يعرف الفرق بين القصيدة و القنبله ***** لقد مر عشرون عاما علينا لقد مر عشرون عام و نحن توابيت مصنوعة من رخام نبايع أي عقيد يجيئ و نلعق جزمة أي نظام و نلبس جلد النمور و نحن حمام و نزعم انّا جبال و نحن نطير بكل اتجاه كريش النعام كريش النعام
merci au bloggueur bouhali pour nous l'avoir fait (re)découvrir http://roufrouf.blogspot.com/2008/02/blog-post_19.html | |
| | | Hyperion Homo Pacificus
Nombre de messages : 3432 Age : 46 Date d'inscription : 01/07/2007
| Sujet: Re: Nizar QABBANI 2/4/2008, 17:28 | |
| - Ghoul a écrit:
- en arabe, nizar 9abbani (désolé Phidias)
- Citation :
لقد مر عشرون عاما علينا لقد مر عشرون عام و لا نجم يسطع لا ارض تحبل لا قمح يطلع من تحت هذا الركام و لا غيمة ماطرة فهل نسي الشارع العربي الكلام و صرنا شعوبا بلا ذاكره؟؟؟ ***** لقد مر عشرون عاما علينا لقد مر عشرون عام و نحن وقوف كأعمدة الكهرباء نحدق مثل البهاليل صوب السماء تمر القطارات من قربنا تمر الحضارات من فوقنا تمر الزلازل من تحتنا فلا نتأمّل شيئا و لا نتعلم شيئا و لا نتذكر شيئا و لا نتحمس حين مجيئ الربيع و لا نتأثر حين الشتاء فلا الله يرضى المكوث لدينا ولا الانبياء ***** لقد مر عشرون عاما علينا لقد مر عشرون عام و ليس هنالك من يطرح الاسئلة و ليس هناك مسيح و لا جلجله و نحن هنا نتناسل مثل الزواحف في الغرف المقفله فاين هو الشاعر العربي الذي كان يبصق نارا و لا يعرف الفرق بين القصيدة و القنبله ***** لقد مر عشرون عاما علينا لقد مر عشرون عام و نحن توابيت مصنوعة من رخام نبايع أي عقيد يجيئ و نلعق جزمة أي نظام و نلبس جلد النمور و نحن حمام و نزعم انّا جبال و نحن نطير بكل اتجاه كريش النعام كريش النعام
merci au bloggueur bouhali pour nous l'avoir fait (re)découvrir
http://roufrouf.blogspot.com/2008/02/blog-post_19.html excellent | |
| | | kaaboura Homulus Kaaborus
Nombre de messages : 646 Date d'inscription : 06/07/2007
| Sujet: Re: Nizar QABBANI 2/4/2008, 17:33 | |
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| | | Phidias Homo Pacificus
Nombre de messages : 5257 Localisation : ... dans le désert Date d'inscription : 04/07/2007
| Sujet: Re: Nizar QABBANI 5/8/2008, 11:18 | |
| Ce Syrien diplomate et lettré, grand enamouré de la beauté, ne dédaigne pas de traiter des problèmes de son temps. Poète, il lui plaît d’endosser l’habit sans apprêt du diseur populaire, avec simplicité, mais d’une écriture plus savante qu’il n’y paraît, ce qui lui a valu un large prestige.
AU CAFE Non loin de moi, elle prit un siège, S’y installa sans hâte et fut comme une rose Exposant sa nonchalance Sur la lèvre du vase
Le papier d’une lettre apparut, humble et soumis, Dans sa main, Moissonnant un reste de sa fidélité.
Ma tasse de café s’échappait, elle, sans cesse De ma main, Dans le désir de rejoindre sa tasse.
Ô le tourment infligé par ce capuchon dont le soleil Auréolait sa tête ! … Et ce poudroiement d’or que met en mouvement L’haleine de l’été ! …
Le voyage d’un rayon de lumière Sur son genou Ebranle les fondations de mon âme !
Elle, de sa tasse, humait à loisir Quelques gouttes de café, Et moi, j’en buvais au bord De ses paupières !
Ah, ce récit conté par les deux yeux, qui me demandent D’être son esclave, Comme sont les astres au ciel En leur perpétuelle ronde !
Chaque fois que je la regarde Longuement, elle rit, Dénudant la blancheur de neige De ses dents.
~
Partage avec moi le café du matin, Et ne t’ensevelis pas dans la moire tristesse De l’irrésolution !
Je suis ton voisin, ô Dame mienne, Et les collines elles-mêmes prennent des nouvelles De leurs voisines.
Qui suis-je ? … Laisse de côté Les questions. Je suis Une esquisse à la recherche des couleurs Qui la feront exister …
~
Un rendez-vous, Madame ? Elle sourit Et me montra du doigt Son adresse sur l’enveloppe.
J’y portai mes regards attentifs, Et ne pus rien voir, sauf La marque du rouge à lèvres Sur sa tasse de café. | |
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| Sujet: Re: Nizar QABBANI | |
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| | | | Nizar QABBANI | |
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