Adultères multiples et immaturité selon Gérard Leleu
- Citation :
- "C'est souvent par immaturité qu'on court de bras en bras. Car en réalité, c'est une mère ou un père qu'on cherche.
Il est vrai que l'état amoureux permet à chacun de rejouer les enfants. Les premiers temps de la rencontre constituent une forme de régression infantile, l'amour naissant faisant réémerger notre enfant intérieur. Et chacun de redevenir qui une petite fille, qui un petit garçon. Pour le meilleur et pour le pire.
Le meilleur, c'est le bon côté de l'enfant. Il nous incite à déposer armes et armures et nous invite à nous offrir à l'amour ou à révéler notre attente, confiant, vulnérable. Il nous permet aussi de redevenir naïf, joueur, créatif, câlin. Et, par le jeu et la tendresse, d'accéder à la fusion. Ce bon côté, on peut l'accueillir avec humilité, c'est le meilleur de l'amour.
Mais on se méfiera du pire, du mauvais côté de l'enfance que la régression a exhibé aussi. Ce sale gosse est tyrannique, et d'autant plus qu'il fut blessé. Il exige qu'on l'accepte inconditionnellement, qu'on réponde immédiatement et totalement à toutes ses attentes, qu'on se consacre entièrement à sa blessure. Il exige enfin qu'on soit semblable à lui, qu'on adopte ses goûts, ses habitudes, ses croyances. Tout cela, il l'exige de façon expresse, voire avec rage ou même violence. De vorace, il peut se faire terroriste. Pour être au service de cet enfant et conforme à ce qu'il veut, le partenaire doit renoncer à ses propres besoins.
Tant qu'il est dans l'état amoureux, le partenaire se voue à cet enfant dont le bon côté est attachant. Mais un jour arrive la phase de crise. Le partenaire le plus mature sort le premier de la confusion (illusions, projections, idéalisation) de l'état amoureux, s'autonomise et prend un peu de recul. L'autre, le plus immature, panique, croit à la trahison et à l'abandon. Le premier, que la crise a encore plus mûri, lucide, voit devant lui un enfant éperdu au lieu de l'adulte qu'il attendait. Comme il l'aime malgré tout, il reste avec lui. Mais c'est l'enfant terrible qui rompra, pour repartir à la recherche d'une autre mère de substitution. A moins qu'il ne s'évade épisodiquement pour se faire materner de ci, de là.
Les immatures sont fondamentalement instables et leur parcours affectif est chaotique. Ils accumulent ruptures et divorces et collectionnent les infidélités. Ils s'emballent et s'engagent prestement mais déchantent aussi vite. Ils continueront à se rendre malheureux et à semer le malheur tant qu'ils n'auront pas conscience que l'être absolu (telle une mère, un père) dont ils rêvent, n'existe pas. Que c'est à eux de mûrir et de trouver en eux l'absolu. Ils pourront enfin passer de l'état amoureux à l'amour véritable."
Gérard Leleu, La fidélité et le couple, 1999
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