Phidias Homo Pacificus
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| Sujet: L'exploration génétique des bactéries qui colonisent l'intestin humain 12/4/2008, 14:55 | |
| Que se passe-t-il dans nos estomac ? Tous les micro univers peuvent désormais être étudiés. Celui de la flore bactérienne intestinale humaine aussi. Et ainsi éclairer nos connaissances sur ces bactéries dont les fonctions ont une importance majeure pour notre santé. La science avance ... - Citation :
- L'exploration génétique des bactéries qui colonisent l'intestin humain va commencer
LE MONDE | 11.04.08 | 16h08 • Mis à jour le 11.04.08
A peine le séquençage du génome humain est-il en voie d'achèvement qu'est lancée une entreprise plus ambitieuse encore : le séquençage du métagénome humain. On désigne ainsi l'ensemble de tous les gènes des espèces bactériennes vivant en symbiose avec l'homme, dans son tube digestif mais aussi à la surface de sa peau ou dans divers orifices naturels comme le nez, la bouche, les oreilles ou le vagin. Ce métagénome renvoie à un univers pratiquement inconnu, d'une complexité considérable et d'une dimension sans doute plus de cent fois supérieure à celle du génome humain, soit plus de trois millions de gènes à identifier et à comprendre.
Le projet MetaHITStructure. MetaHIT mobilisera une douzaine d'organismes de recherche et d'industriels européens parmi lesquels le Wellcome Trust Sanger Institute (Royaume-Uni), le Centre national français de séquençage ou The European Molecular Biology Laboratory. Son budget s'élève à 20 millions d'euros pour quatre ans avec une contribution de la Commission européenne de 11,4 millions d'euros. MetaHIT s'inscrit dans un cadre plus général qui rassemblera des partenaires internationaux, américains et chinois notamment.
Propriété intellectuelle. Comme pour le séquençage du génome humain, les données brutes issues de MetaHIT seront mises gracieusement à la disposition de la communauté scientifique. En revanche, dès que des travaux apporteront une valeur ajoutée sur la fonction de telle ou telle séquence bactérienne, une protection par brevet de la propriété intellectuelle pourra être obtenue.
Marion Guillou, présidente de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), a ainsi officiellement lancé, vendredi 11 avril, un vaste projet européen visant à décrypter, dans les prochaines années, l'ensemble des génomes de la flore bactérienne intestinale humaine.
L'INRA coordonnera ce projet qui, via le séquençage, a pour objet de caractériser les fonctions de ces génomes et d'analyser les interactions qui existent entre eux et la physiologie humaine. Ce travail sera mené au sein d'un consortium européen dénommé MetaHIT (pour Metagenomics of Human Intestinal Tract). Il pourrait ouvrir de nombreuses perspectives d'applications industrielles et médicales. Des projets complémentaires sont en cours aux Etats-Unis.
"Dès 2005, un consensus s'était dégagé chez les principaux responsables de la génomique et du séquençage pour dire tout l'intérêt potentiel qu'il y aurait à se pencher sur notre métagénome", explique Stanislav Dusko Ehrlich (INRA), qui coordonnera le projet MetaHIT. "On aurait certes pu se borner à continuer les séquençages des génomes des animaux domestiques, de l'ours des cavernes ou des organismes de la mer des Sargasses. Il nous a semblé qu'il serait préférable d'enquêter, avec la puissance des nouveaux outils de la génétique, sur l'immensité du monde bactérien qui vit en symbiose avec l'être humain et qui, pour une large part, se situe dans le tube digestif et tout particulièrement dans nos intestins", ajoute-t-il.
Si on en pressent depuis longtemps l'importance, on ne sait encore que peu de chose des relations que l'homme entretient avec cette flore qui colonise rapidement le tube digestif après la naissance. On estime qu'elle est constituée d'un millier d'espèces de bactéries, dont le nombre total est dix fois supérieur à celui de toutes les cellules qui constituent un organisme humain.
"Ces bactéries ont des fonctions indispensables à notre santé : elles synthétisent des vitamines, contribuent à la dégradation de certains composés que nous serions, sans elles, incapables d'assimiler, résume Joël Doré (INRA). Elles jouent un grand rôle dans les fonctions immunitaires en nous protégeant contre les bactéries pathogènes et en établissant un dialogue avec les cellules épithéliales intestinales."
Seule une toute petite fraction de cette population est cultivable en laboratoire grâce aux techniques de la bactériologie classique. Pour l'essentiel des bactéries, on ne sait pratiquement rien. Les responsables de MetaHIT estiment qu'ils pourront rapidement explorer cet univers grâce à la métagénomique. Cette nouvelle approche se propose d'analyser directement les génomes de tous les micro-organismes vivant au sein d'une niche écologique - ici, l'homme - et qui ne peuvent pas être cultivés. Après extraction de la population microbienne de sa niche, l'ADN est purifié avant d'être séquencé par des méthodes à haut débit. L'analyse informatique de la séquence devrait ensuite permettre d'identifier les fonctions des gènes bactériens puis d'explorer les interactions, normales ou pathologiques entre la flore et l'hôte.
Des essais cliniques seront rapidement lancés au Danemark et en Espagne pour étudier les possibles corrélations entre la flore intestinale et l'obésité ou des maladies inflammatoires digestives chroniques. Rien ne permet toutefois aujourd'hui d'assurer que cet ambitieux projet pourra être mené à son terme ni que ces prolongements intéresseront prioritairement l'agroalimentaire ou la médecine humaine.
Jean-Yves Nau
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